Cumul des mandats présidentiels : ce qui pourrait bientôt changer
Face aux zones d’ombre entourant la possibilité de cumul dans le temps des mandats présidentiels, le sénateur Yan Chantrel (Parti socialiste) a déposé une proposition de loi organique. Son objectif : empêcher que l’interruption anticipée d’un mandat permette à un président de la République de contourner la limite constitutionnelle des deux mandats consécutifs.
Depuis quand le président de la République est-il limité à deux mandats consécutifs ?
La limitation à deux mandats consécutifs pour le président de la République est une évolution récente. En effet, cette règle a été introduite par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui a modifié l’article 6 de la Constitution de la Ve République.
L’objectif de cette réforme était d’encadrer strictement le nombre de mandats présidentiels successifs qu’une personne peut exercer, pour éviter la monopolisation du pouvoir et garantir une alternance démocratique saine. Jean-Luc Warsmann, le rapporteur de la révision constitutionnelle de 2008 à l’Assemblée nationale, écrivait d’ailleurs dans son rapport que « dix ans constituent un horizon admis comme assez long dans nombre de démocraties. Ce temps est suffisamment long pour permettre de conduire un programme politique très ambitieux. »
À noter : avant 2008, aucune limite n’existait. Un président pouvait donc se représenter indéfiniment.
Pourquoi cette clarification du cumul des mandats présidentiels ?
Portée par le sénateur Yan Chantrel, la proposition de loi vise à inscrire dans la loi organique un principe très clair : « un mandat est réputé avoir été exercé par le Président de la République même lorsqu’il a été interrompu avant son terme normal. » Autrement dit, que le chef de l’État aille au bout ou non, chaque mandat entamé est comptabilisé comme un mandat plein dans le calcul de la limite constitutionnelle des deux mandats consécutifs.
« L’article 6 de la Constitution ne dit rien quant à la durée ou la complétude des deux mandats consécutifs autorisés au Président de la République », rappelle-t-il. Par conséquent, s’il venait à se représenter immédiatement après avoir démissionné de son second mandat, le Conseil constitutionnel devra statuer sur son éligibilité ou sur un éventuel recours contre cette candidature.
« Afin d’éviter que le Conseil constitutionnel, en grande partie nommé par le président de la République lui-même, ne se retrouve dans la position inconfortable de statuer sur son éventuelle candidature à l’élection présidentielle, la présente proposition de loi organique propose de lever toute ambiguïté dans le texte de la Constitution, fidèlement à l’esprit du constituant qui visait à limiter à dix années consécutives l’exercice du pouvoir présidentiel », explique Yan Chantrel.
Bon à savoir : une proposition de loi organique est un type de texte législatif prévu par la Constitution. Elle a pour but de préciser ou de compléter certains articles de la Constitution. À la différence d’une loi ordinaire, une loi organique doit suivre une procédure d’adoption plus stricte, incluant un contrôle obligatoire de conformité par le Conseil constitutionnel avant sa promulgation.